Transcription de l'interview par Christian Lucet d'E.L. pour le magazine Montréalais underground "Solarisine".
E.L. est l'auteur d'une analyse sur la baguette préhistorique d'Arudy (Sud-Ouest de la France), une baguette datant du magdalénien (17 000 à 9 000 avant notre ère ) retrouvée dans une grotte préhistorique, il en propose un décryptage en ligne en février 2012, ainsi qu'une vidéo sur son site Internet. Sa théorie est que la baguette est le premier calendrier luni-solaire perpétuel et qu'il possède deux sens de lecture représentant un cycle solaire et lunaire infini, les symboles de la baguette ayant une valeur numérique et temporelle.
Il a déjà commis pour Solarisine quelques articles culturels et il nous livre ici sa version des faits !
Solarisine : Pourquoi lâcher vos recherches en pâture sur le net sans les avoir faites valider scientifiquement ?
E.L. : C’est l’objectif « zéro papier », « zéro contrôle » (rires).
Plus sérieusement, j 'ai déjà eu l'occasion d'être diplômé, donc validé pour un travail intellectuel et pour être franc cela ne m'a rien apporté de plus, il n' y a qu'au Canada où j'ai pu trouver un boulot correct après mes études. En France mes seules perspectives étaient le Mac Do ou des stages ad vitam aeternam.
De plus, je trouve que le milieu actuel de la recherche en sciences humaines en France est sclérosé, n'offrant aucune opportunité d'épanouissement personnel, on cherche des scribes et des compilateurs, après un tel formatage, difficile d'avoir des idées novatrices. Quand on doit en plus galérer avec un boulot pour payer ses études comme je l'ai fait, les perspectives sont déprimantes. Le seul avantage que les étudiants du monde entier nous envient, c'est le coût limité de nos études et la qualité de nos enseignants indéboulonnables.
S : Comment définissez-vous votre démarche ?
E.L. : Je me définie comme « ethnologue », car c'est le seul mot connu actuel qui s'approche de ma démarche. Photographe, c'est pour l'appréhension que j'ai des choses, je pense en visualisant, mais je n'ai rien d'un technicien, tout au plus un bidouilleur à l'instinct.
S : Vous sentez-vous artiste ?
E.L. : J'ai trop de respect pour l'art pour me définir comme un artiste, je suis un amateur dans le sens que Stan Brakhage donnait à ce mot.
S : Comment en êtes-vous arrivé à décrypter une baguette du magdalénien ?
E.L. : C'est avant tout une initiative personnelle sur un projet qui me tient à coeur ayant pour sujet ce que l’archéologue Marcel Baudouin appelait « la religion stello-solaire au solutréen ».
S : Quelle a été votre processus intellectuel ?
E.L. : Tout d'abord, je suis passé par la « psychogéographie » situationniste et je me suis familiarisé avec le concept d'errance et de nomadisme. Puis, je me suis débarrassée de toute « idéologie » soixante-huitarde et/ou freudo-marxiste en quittant l'Université française. J'ai pu au fil de mes lectures considérer les nombreux emprunts de Debord à Nietzsche, au niveau d’un monde-apparence, ce qui m'a amené à chercher la vérité, la vérité comme fille du temps comme le disait Pierre Hadot. La notion de cycles aussi a guidé mes recherches . J'ai donc réfléchi à un sujet qui m'intéresse beaucoup pour avoir travaillé avec des enfants autistes, qui est celui de la pensée avant le langage, ou la représentation mentale avant le langage. J'ai ainsi découvert de nouvelles perspectives avec la notion de géographie sacrée, en zone de montagne par exemple, je me suis intéressé aux mythes fondateurs de diverses cultures et leurs résurgences, notamment à travers l'histoire de la pensée et l'histoire de l'astronomie. L'art autochtone canadien m'a aussi beaucoup intéressé lors de mon séjour. La préhistoire me fascinant depuis tout petit, j'ai naturellement fait le lien intellectuel avec tout ce vers quoi je tends depuis l'enfance. J'ai ensuite erré dans les bibliothèques de retour en France, où je fais partie des meubles. J'ai ma place et ma prise électrique dans la médiathèque de mon quartier.
S : Êtes-vous conscient que votre découverte va faire l'effet d'une bombe intellectuelle ?
E.L. : Oui et c'est très bien comme cela.
S : Comment invente t-on un nouveau langage ?
E.L. : J'ai eu des cours « optionnels », comme on dit en France, d'écriture hiéroglyphique, de japonais et de bulgare, ce qui m'a apporté beaucoup d'ouverture d'esprit. Ensuite je n'ai pas « inventé », j'ai juste « observé » et rationalisé. Et ce que j'ai découvert est fabuleux d'ingéniosité. Piette, l'archéologue qui a découvert la baguette avait de suite pressenti qu'il s'agissait d'une « écriture hiéroglyphique » faite de « symboles », pour reprendre ses termes. Il ne s'est pas trop avancé de peur de passer pour un allumé, mais il a « senti » le « solaire » dans l'utilisation de cette baguette, pareil pour Marcel Baudouin, qui lui, voyait dans la grotte de Lascaux la conceptualisation imagée des constellations. Je continue le travail de ces deux précurseurs en quelque sorte.
S : Vous n'avez pas peur de vous « griller » dans la profession avec une telle présentation iconoclaste ?
E.L. : C'est déjà plus ou moins fait, l'environnement culturel dans la région qui est mon habitat naturel est un microcosme. Une mentalité d'allégeance bien française. Je n'en fais pas partie et c'est très bien ainsi. La principale différence avec un « chercheur officiel », c'est que moi je n'ai rien à perdre ni à vendre. Toutes mes recherches sont financées de ma poche et en libre accès sur mon site web avec l'aide de mon webmestre bénévole. Puis, pour tout vous dire, les chercheurs savent ce qu'ils doivent aux « érudits locaux », ils font souvent gagner dix ans d'avance à la recherche « officielle », mais doivent parfois en porter les stigmates, si c'est mon destin, je l'accepte avec le sourire.
S : Vous lancez vos recherches à la face Internet du monde le jour de vos 33 ans, y' a t-il un côté « spirituel » à votre action ?
E.L. : J'aime le penser.
S : Vous reviendrez travailler avec nous si la fin du monde n'a pas lieu en 2012 ?
E.L. : Je pense que l'Escargot-Lune fera renaître le nouveau Soleil-Graine en 2013. Mais je peux me tromper ! (Rires) Donc la réponse est oui, mais j'attendrai l'équinoxe de printemps avant de revenir vous voir, je me souviens du froid (rires).
Montréal, 2012.
Source : Solarisine Février 2012
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